Tribune de Danièle Mitterand, Présidente de France Libertés.
Publiée dans l'Humanité du 8 Octobre 2007.
Une longue expérience vécue, confortée par une certaine connaissance des faits de l’histoire, m’ont convaincue qu’aucun chef d’État ou de gouvernement n’a le pouvoir de mener sa politique que si elle est comprise par une grande majorité de l’opinion publique, et entérinée par les institutions de contrôle du respect des lois fondamentales de la République. Je ne peux imaginer que, devant le petit écran, regardé tous les soirs par des millions et des millions de Français, les esprits restent sans réaction devant l’énormité immorale de cette affaire de l’ADN, utilisé comme « marqueur » d’identité.
Nos élus, sensibles aux injonctions d’un gouvernement, auraient-ils perdu leur libre arbitre et leur sens moral critique pour oublier les leçons de l’histoire ? Cette histoire que nous sommes aujourd’hui quelques-uns seulement à avoir vécue, au bénéfice de l’âge. Je ne rappellerai pas les mauvaises manières d’un temps que personne ne peut oublier, quand il s’agissait de désigner qui a le droit de vivre en France, selon une « bonne » ou contestable filiation biologique.
Ne faisons pas de l’ADN - symbole de l’unité de la vie et de l’universelle filiation des espèces - un espion, un indicateur de police, un nouvel avatar du racisme biologique. Je demande à ceux qui me liront d’user de leur raison, de leur bon sens et de la morale. Qu’ils se conduisent en citoyens responsables pour mettre en garde le gouvernement de se déshonorer. J’ai pris connaissance avec beaucoup de satisfaction du rapport de la Commission d’éthique, dont je partage la conclusion. Puissent nos parlementaires méditer ce texte, afin que plus jamais la biologie ne soit mise au service de l’idéologie.