Éducation . Le congrès du SNES, principal syndicat des enseignants du secondaire, s’ouvre aujourd’hui. Entretien avec Bernard Boisseau, cosecrétaire général sortant de l’organisation.
En plein coeur de la campagne électorale et d’une lutte au long cours, le congrès du SNES-FSU, principal syndicat des enseignants du secondaire, s’ouvre aujourd’hui. Mobilisés contre les 6 000 suppressions de postes inscrites au budget 2007, les profs le sont aussi contre les décrets portant sur leurs obligations de services. La veille de la grève du 20 mars, la majorité des candidats, y compris à droite, déclaraient, de façon plus ou moins nette, vouloir abroger ces décrets. Le SNES a donc envoyé, à tous, une série de questions relatives à l’école. La synthèse des réponses doit être présentée cet après-midi.
Votre congrès s’ouvre à trois semaines du premier tour de la présidentielle. - Dynamisant ou - inhibant ?
Bernard Boisseau. Nous avons hésité à le reporter, le contexte politique pouvait nous placer en situation d’attente... Au bout du compte, nous ne regrettons rien. Cela nous a permis d’accentuer la pression sur les candidats et de mettre en avant nos objectifs à court terme autant que notre volonté que se dessine un projet pour l’école.
Quel serait un projet - signifiant selon vous ?
Affirmer clairement que la France a besoin de plus de bacheliers, et dégripper un système scolaire qui stagne depuis des années. L’enseignement secondaire est complètement sinistré. Il n’en va pas seulement des 27 000 suppressions de postes, depuis 2003. La loi d’orientation sur l’école (1), l’apprentissage à quatorze ans... Tout cela renforce la - ségrégation scolaire et sociale. Il est nécessaire de changer de cap, d’abroger ces lois. De redonner une vraie place à l’éducation prioritaire, aussi, avec des effectifs d’élèves plus réduits dans les classes, et des temps réservés au travail en équipe pour les profs.
Les principaux candidats disent qu’ils abrogeront les décrets contre lesquels vous vous battez depuis octobre. Victoire assurée ?
Tant qu’ils ne seront pas abrogés et que les 3 000 postes auxquels ils correspondent ne seront pas rétablis, la victoire ne sera pas acquise. D’ailleurs, tous ne l’affirment pas de façon si évidente. Nicolas Sarkozy, par la voix de - Xavier Darcos, ne parle que de suspension... S’il est vrai qu’il prend ses distances avec Gilles de Robien sur ce point, les propositions qui accompagnent ce geste laissent perplexe, quand elles parlent d’annualisation du temps de travail...
Ne craignez-vous pas une drague électoraliste ?
Peut-être certains recherchent-ils, effectivement, le vote enseignant. Mais je crois aussi que nous avons su créer un rapport de force suffisant pour imposer l’idée d’abroger ces décrets. Quoi qu’il en soit, je pense qu’on exagère ce fameux vote des profs. Un jour, on les dit tous à gauche, le lendemain on assure qu’ils voteront à droite... Un sondage du CEVIPOF, le mois dernier, révélait qu’ils étaient la catégorie professionnelle la moins sensible au « ni gauche-ni droite ». Donc, a priori, la moins tentée par le vote Bayrou, pour lequel l’effet est, me semble-t-il, conjoncturel. Rien n’est assuré pour le premier tour, les prédictions fluctuent en fonction des événements de la campagne. On l’a vu en septembre, au moment de cette histoire avec la vidéo de Ségolène Royal...
La grève, mardi dernier, a été moins suivie que les précédentes. Pensez-vous toujours pouvoir articuler mobilisation et élection ?
Nous allons en discuter lors de ce congrès. Il ne sera pas évident d’utiliser ce moyen d’action quand, jusqu’à la nomination du futur gouvernement, nous n’aurons affaire qu’à des interlocuteurs potentiels. Cela dit, la grève n’est pas - exclue. Nous maintiendrons la pression par des actions - locales, comme ils s’en développent ces dernières semaines dans les lycées et - - collèges.
Entretien réalisé par Marie-Noëlle Bertrand - Humanité.fr du 26 Mars 2007