Quel est l’impact actuel de la politique de l’Union européenne sur le secteur du logement ?
Francis Wurtz. En principe le logement n’est pas un domaine relevant de la compétence européenne. Mais, en réalité, plusieurs règles influent sur le logement, notamment social. Il en est ainsi, par exemple, des pressions pour diminuer la part des financements publics. Mais il y a plus pernicieux : l’omniprésence des règles de la libre concurrence. La Commission européenne estime que quasiment toutes les activités économiques à dimension sociale doivent être soumises aux règles de la concurrence. Lors du débat sur la directive services (dite Bolkenstein - NDLR), le Parlement avait obtenu l’exclusion du logement social du champ d’application de cette directive. Toutefois, la Commission avait précisé que le droit européen de la concurrence s’appliquait au domaine du logement social dans la mesure où il est considéré comme une activité économique. Le droit communautaire précise qu’une activité économique ne peut bénéficier d’une dérogation à ces règles que si l’État concerné peut prouver que l’application des règles de concurrence fait échec à l’accomplissement d’une mission de service public. Chaque État se doit donc de se justifier, la Commission décidant seule si cette demande est acceptable ou pas.
La pénurie de logement au niveau européen et la tension croissante sur les marchés sont-elles de nature à modifier la position de l’Europe ?
Je n’ai malheureusement pas cette impression. La charte des droits fondamentaux vient d’être réadoptée par les gouvernements européens sans que l’article concernant le logement n’ait été modifié d’un iota. Or le droit au logement n’y figure pas. Il n’est question que d’aides au logement. La charte exclut même toute harmonisation législative ou réglementaire au niveau européen. Ce qui est toutefois intéressant, c’est que le problème du logement devient un enjeu politique crucial dans bon nombre de pays. Nous pouvons espérer que la convergence des mobilisations, soit pour conserver des acquis menacés, soit pour résoudre des problèmes devenus insupportables, rende incontournable la prise en compte du problème à l’échelle de l’Union. C’est toute la vocation des états généraux européens du droit au logement d’y contribuer. Et c’est en tout cas la raison principale de la participation de notre groupe politique à cet effort.
Entretien réalisé par C.P.