Jean-François Yon, président du Mouvement national des chômeurs et précaires (MNCP) dénonce la politique de sanction qui pourrait être mise en place, selon "les Echos".
Entretien réalisé par raphaëlle Remande - Liberation.fr du 14 Avril 2008.
Le gouvernement pourrait durcir les contrôles après six mois de chômage. Quelles seraient les conséquences de cette mesure ?
Notre réaction tient en trois mots: ce serait inadmissible, injuste et surtout inutile. Beaucoup de contrôles ont déjà été mis en place, comme le suivi mensuel personnalisé. Aujourd'hui, les chômeurs doivent justifier de leur recherche d'emploi, donc je ne comprendrais pas un durcissement des règles. Les radiations et les retraits existent, alors pourquoi forcer la dose? Ce n'est pas anodin. Des sanctions viendraient encore stigmatiser cette partie de la population. Cela accroît la tension entre les salariés et les chômeurs.
Vous arrive-t-il d'accompagner des chômeurs qui sont trop "difficiles" ?
Bien sûr. Mais c'est comme les RMistes fraudeurs. Cela ne concerne qu'une minorité. Aujourd'hui, des personnes qui prennent plaisir à ne pas travailler, je n'en connais pas. Le gouvernement veut faire croire qu'il peut faire baisser ce qu'on appelle le "chômage frictionnel". Mais ce type de chômage, qui représente entre 300.000 et 400.000 personnes, vient du décalage entre l'offre et la demande. Il a toujours existé. Avec presque 3 millions de chômeurs, on sait qu'il n'y a pas assez d'emplois pour tout le monde aujourd'hui en France. Faire pression sur les chômeurs, c'est un discours simpliste. C'est absurde et scandaleux. < /p>
Y a- t-il des risques d'abus ?
Nous voyons de plus en plus de chômeurs qui sont radiés du jour au lendemain. Toutes les personnes que nous avons accompagnées au sein de notre association ont réintégré leurs droits. Cela nous paraît donc arbitraire. Ces sanctions seraient une catastrophe pour beaucoup. Pour ceux qui refuseront, ce sera la suppression des revenus, et le RMI. Ceux qui accepteront des emplois éloignés et pas satisfaisants se mettront dans une situation de précarité. Le gouvernement ne va pas réduire le chômage, il va le déguiser en emploi précaire.