Par Rémi LEFEBVRE, Professeur de sciences politiques à l’université de Reims (CERAPS, LILLE 2), signataire de l'appel de Gauche Avenir. Publié dans Pour une gauche de gauche aux éditions Du Croquant
Source : http://www.gaucheavenir.org/
Existe t'il encore des militants de ‘gauche’ au PS ? Comment peut-on rester au PS ? Ces militants ont-ils de bonnes raisons d’y agir et de maintenir leur engagement dans cette organisation ? A quoi bon ? : de nombreux partisans d’une « gauche de gauche » s’interrogent sur la pertinence d’un militantisme au PS tant sa « droitisation » sur le plan idéologique leur apparaît manifeste, déjà ancienne ou inéluctable.
L’adhésion à une organisation, entendue à la fois comme affiliation et attachement, met en jeu des types de liens et d’identités qui ne revêtent pas exclusivement une dimension idéologique. Toute institution implique certes de ses membres une adhésion idéologique minimale, mais les partis politiques tiennent aussi comme institution par les luttes dont ils font l’objet. Les partis sont des champs de luttes et de forces pour la définition légitime de ce qu’ils doivent être et l’appropriation du capital collectif. « Les participants à la relation partisane ne sont pas là pour les mêmes raisons » . Il y autant de vérités que d’usages de l’institution : on peut ainsi se dire « socialiste » de diverses manières. Une partie des militants du PS dénoncent son évolution « libérale », « sociale-libérale » ou « sociale-démocrate » mais y restent attachés et militent pour y infléchir cette orientation idéologique. Peser sur le PS leur apparaît comme un enjeu politique majeur qui conditionne le maintien de leur engagement. Quitter le PS leur apparaitrait comme un renoncement, un reniement, une invalidation de leur engagement passé.
Pour autant, le militantisme à la « gauche » du PS fait bien problème parce qu’il est source de dissonances cognitives et de désajustements identitaires qui contraignent les militants à reconsidérer en permanence le sens de leur engagement et à rationaliser ce qui les fait agir. La tentation de la défection (au sens d’Albert Hirschman) est constante chez ceux qui ne s’identifient pas ou plus à l’organisation dans laquelle ils militent et vivent souvent douloureusement cette situation de porte-à-faux. Déchirés entre des loyautés contradictoires, ils concilient, non sans difficultés, fidélité à soi et allégeance au parti. Comment aménagent-ils leurs croyances, « tordent »-ils leurs convictions ? Qu’est-ce qui tient et retient ces militants au PS ? Il convient d’interroger les conditions de possibilité d’un militantisme devenu improbable tant il est coûteux sur le plan identitaire. Encore faudrait-il identifier de quoi l’on parle… Comment délimiter « la gauche au PS » ? Statuer sur les limites de cet espace intra-partisan c’est, de fait, entrer dans les luttes de classement de l’organisation et mobiliser des notions au contenu par définition fluctuant. Les tendances ou sensibilités au sein des partis n’ont d’existence que relationnelle. La labilité et la désidéologisation des courants rendent encore plus problématique cette entreprise. L’homogénéité de la « gauche du PS » apparaît faible tant l’éclatement et la fréquence des reclassements dominent. On s’attachera ici aux militants de « gauche » qui se définissent comme tels depuis 2002 et notamment depuis le débat interne sur le Traité constitutionnel européen qui a coagulé, par sa logique bipolaire, une « gauche » et une « droite » au PS.
Les contours incertains de la « gauche » du PS
Depuis la refondation des années 1970, une tradition de « gauche du PS » perdure, portée par plusieurs courants successifs, un courant unique à gauche n’étant jamais parvenu à s’imposer. Les luttes de courants autour desquelles s’organise le pluralisme interne constituent la grammaire dans laquelle se vivent la plupart des conflits au sein du PS. Il est difficile d’exister et de compter au PS sans y être affilié. Mais la légitimité et le statut des courants se sont beaucoup transformés depuis le congrès de Rennes de 1992. Il ne s’agit pas d’idéaliser le passé : les courants du PS n’ont jamais été des rassemblements homogènes d’individus ou de groupes partageant tous la même idéologie. Les courants sont souvent des équipes homogénéisées idéologiquement a posteriori. Les courants minoritaires (rocardien, poperéniste, mauroyiste, CERES), s’ils se distinguent sociologiquement et idéologiquement par certains traits (notamment par la place différente accordée à la laïcité et au rôle de l’État) sont surtout la conséquence de compagnonnages politiques anciens où se combinent des liens personnels avec le leader du courant, les concours de circonstances ou les contraintes de situation. Pour autant, chaque courant, y compris le courant central mitterrandiste, s’efforçait de justifier son existence en fonction d’orientations idéologiques, stratégiques et programmatiques. Pour ce faire, la production des frontières symboliques entre courants prenait appui sur les cultures politiques représentées dans le parti et dans le milieu socialiste (dans les syndicats, les associations laïques, les associations d’éducation populaire…), même si les deux ne se superposaient qu’imparfaitement.
Après le congrès de Rennes, les courants deviennent essentiellement des machines à répartir des postes (des sections aux ministères). Ils constituent secondairement des réseaux de solidarités et d’amitiés issues du travail commun ou d’anciennes luttes. Les réunions de courant se raréfient, ne s’adossent plus véritablement à un travail d’intellectuel, leurs revues disparaissent. Dans un parti qui se professionnalise à tous les niveaux, l’affiliation à un courant est plus que jamais dictée par ceux qui contrôlent localement les ressources stratégiques et électorales. Les sensibilités organisées apparaissent par ailleurs dévaluées car associés à un esprit de division que le congrès de Rennes a ancré dans la mémoire socialiste. Au congrès de Liévin en 1994, les courants sont systématiquement opposés au « débat d’idées » et à la légitimité militante qu’ils conduiraient à court-circuiter. Enfin l’intégration progressive de représentants de toutes les tendances du parti dans le gouvernement Jospin a entamé leur pouvoir de contestation et de distinction . Les courants de « gauche » n’échappent que partiellement à ces transformations.
La Gauche Socialiste (GS) représente à gauche le courant le plus structuré dans les années 1990. La GS constitue d’ailleurs toujours un vivier de cadres voire une matrice de l’adhésion à la gauche du parti. La plupart des dirigeants classés à gauche en sont aujourd’hui issus. Fondée en 1988 par Jean Luc Mélenchon et Julien Dray en réaction à l’ouverture du gouvernement de Michel Rocard à des personnalités centristes, liée au syndicalisme étudiant et à SOS racisme, elle prend la suite de la Nouvelle Ecole socialiste, fondée par les deux mêmes personnalités. Marie Noëlle Lienemann la rejoint en 1991, Gérard Filoche en 1995. Entre 1993 et 1995, elle participe à la majorité. Au congrès de Brest de 1997, elle obtient 10,21% des voix et 13,5% à Grenoble en 2000. Elle ne survivra pas à la réouverture du jeu interne et à sa redéfinition après les élections de 2002.
L’échec de 2002 entraîne une recomposition politique interne et une restauration de la logique de courants. Trois nouveaux courants que l’on peut classer à la gauche du PS apparaissent : le Nouveau Parti Socialiste (NPS), Nouveau Monde (NM) et Forces Militantes. Ils partagent un même diagnostic de la défaite (refus de la thèse du 21 avril comme « accident », divorce entre le PS et les catégories populaires) et dénoncent « la dérive sociale-libérale » du parti incarnée alors, à leurs yeux, par Laurent Fabius et Dominique Strauss-Kahn qui participent à la majorité issue du congrès de Dijon de 2003. Mais ils se distinguent par plusieurs aspects qui tiennent à la fois à leur discours et à la sociologie des groupes militants qu’ils mobilisent. Sur la base d’un discours rénovateur sur le plan institutionnel (la « Sixième République »), d’une critique de la professionnalisation politique (mise en cause du cumul des mandats) et de la mise en avant de thèmes « sociétaux », le NPS fédère des militants jeunes et fortement dotés en capital culturel, outsiders qui aspirent aux responsabilités . Emmené par Arnaud Montebourg et Vincent Peillon , le NPS mobilise clairement sur une base générationnelle, stratégie qui peut apparaître comme efficace dans un parti devenu vieillissant. La base militante de NM qui rassemble Jean-Luc Mélenchon, Henri Emmanuelli et les ex-poperenistes est plus traditionnelle, plus âgée et très attachée à l’identité historique du parti et à des référents anciens comme la laïcité ou la défense des services publics. Forces Militantes, nées de la dissidence de Marc Dolez, premier secrétaire de la fédération du Nord qui conteste le leadership de Pierre Mauroy, ne parviendra pas véritablement à élargir son audience au-delà de ce département. Au congrès de Dijon (2003), NM obtient 16,3% des suffrages, le NPS 16,9%. Les deux sensibilités font campagne pour le Non au Traité Constitutionnel Européen lors de la consultation interne des militants aux côtés de Laurent Fabius qui, après avoir soutenu François Hollande à Dijon, sans se compter, prend ses distances avec la majorité du parti. Suite à des désaccords personnels entre Jean Luc Mélenchon et Henri Emmanuelli, NM est mis en sommeil début 2005. Il ne sera jamais réactivé. Jean-Luc Mélenchon rejoint Laurent Fabius et Henri Emmanuelli le NPS. La « gauche » du PS se présente à nouveau divisée lors du congrès du Mans. Le courant NPS recueille 23,5%, la motion « Rassembler à gauche » déposée par Laurent Fabius et soutenue notamment par Marie Noëlle Lienemann, Jean-Luc Mélenchon et Alain Vidalies obtient 21,2%. Laurent Fabius peut être alors classé à la gauche du PS. NPS a refusé de faire motion commune pour ne pas conforter Laurent Fabius dans son ambition présidentielle. Les deux motions classées à gauche acceptent la synthèse à l’issue du congrès. Les deux courants minoritaires avaient lié leur sort et prévenu dès l’origine qu’il y aurait « synthèse générale ou pas de synthèse du tout ». Cinq responsables dont Arnaud Montebourg et Marc Dolez s’abstiennent lors du vote de la synthèse dans la commission des résolutions. Jean-Luc Mélenchon justifiera a posteriori la synthèse en ces termes : « il fallait éviter de se faire marginaliser avant le vote sur l’investiture. C’était de la pure cuisine de congrès socialiste » . NPS se scinde immédiatement après le congrès suite au départ des partisans d’Arnaud Montebourg hostiles à la synthèse générale qui créent Rénover maintenant. Les partisans du Non au TCE se divisent lors de la campagne de désignation du candidat socialiste à l’élection présidentielle. Arnaud Montebourg (sans avoir consulté la base de Rénover Maintenant) et Vincent Peillon soutiennent Ségolène Royal. Marie Noëlle Lienemann, Jean-Luc Mélenchon, Alain Vidalies… soutiennent Laurent Fabius. Henri Emmanuelli après avoir encouragé la candidature de François Hollande ne soutient officiellement aucun candidat. Marc Dolez et Gérard Filoche ont un temps rassemblé leurs forces dans Forces militantes-Démocratie et socialisme mais se divisent sur le choix présidentiel : le premier soutient Laurent Fabius, le second Ségolène Royal.
Depuis 2002, la gauche du PS est constituée ainsi d’une multiplicité de sensibilités hétérogènes et fluides. En recomposition permanente, elle ne parvient pas à conjurer une tendance à la scissiparité. Mobilisée lors du référendum interne sur le TCE qui a permis de solidifier, par des combats communs, une identité de gauche , elle se divise sur la désignation à l’élection présidentielle qui domine l’agenda socialiste à partir du congrès du Mans. La multiplication des consultations directes des militants et des débats internes dont témoigne la consultation interne sur le TCE ont des effets contradictoires. Elle ouvre certes aux courants des opportunités nouvelles dans la compétition interne et leur permet de se compter mais elle les contourne dans le même temps en consacrant la souveraineté individuelle des militants. Les nouvelles formes d’expression militante sont d’ailleurs pensées comme des formes concurrentes d’expression des courants. La désignation de Ségolène Royal par une forte majorité de militants dès le premier tour a transcendé les logiques de courants. La présidentialisation du parti que cette « démocratisation » consacre tend à personnaliser les enjeux et entretient de fortes rancœurs personnelles .
La place numérique et stratégique occupée par les professionnels de la politique dans le PS, croissante depuis une vingtaine d’années, en a bouleversé progressivement l’économie interne et l’économie morale, ce qui a affecte fortement le fonctionnement des courants. Les intérêts électoraux sont devenus prépondérants à tous les niveaux du parti, ce qui cantonne les tâches d’élaboration programmatique et le travail militant le plus quotidien (en dehors des phases de mobilisation électorale) au plus bas de l’échelle des pratiques. L’emprise croissante des élus locaux fragilise les courants qui en dépendent. Pour compter dans le parti, les courants doivent rallier des élus à la fois parce qu’ils sont source de financement et parce qu’ils « tiennent » les sections et fédérations et pèsent sur les votes internes. Les diverses sensibilités de gauche ont un fort ancrage local (Jean-Luc Mélenchon dans l’Essonne, Henri Emmanuelli dans les Landes, Marc Dolez dans le Nord…). L’analyse de Philippe Juhem, fondée sur l’étude de la distribution des votes par section lors de trois consultations militantes (Congrès de Dijon et du Mans, référendum sur le Traité constitutionnel européen) établit l’influence des élus dans l’orientation des votes internes lors des congrès ou des votes militants . Le vote des militants est captif dans une large mesure. Lorsqu’un élu change de courant, il emporte avec lui la majorité des adhérents de sa section (ce qui donne le « prix » de son ralliement). La faiblesse des courants minoritaires résulte dans une large mesure du nombre limité de grandes sections où ils disposent d’une majorité significative. « Lors du congrès de Dijon, les sections situées dans des municipalités socialistes dans lesquelles une motion est hégémonique votent en effet à plus de 90 % en faveur du courant majoritaire de François Hollande. La motion A obtient en moyenne 86 % des voix de ces sections soit 12600 suffrages et 13,2 % de l’ensemble du parti » . Le ralliement des élus conditionne la force des courants mais explique largement leur fluidité dans la mesure où leur affiliation est fragile car dictée par des considérations avant tout stratégiques. Les conflits locaux sont retraduits et légitimés par leur inscription dans l'affrontement des courants et empruntent, de ce fait, leurs justifications à l'identité construite par leurs leaders. Le surcodage des débats par des enjeux liés aux investitures électorales est manifeste.
La labilité des positionnements internes est renforcée par la désidéologisation des courants et du parti dans son ensemble. La faible consistance idéologique et les faibles écarts distinctifs qui spécifient les divers courants autorisent tous les reclassements et rendent les frontières politiques internes particulièrement plastiques. Ainsi, l’appartenance aux courants de gauche n’est pas fortement prédictive (chez les élus notamment) du vote Non lors de la consultation interne sur le TCE. En l’absence de courants structurés idéologiquement et sociologiquement et dans une situation où les grands élus locaux dominent plus que jamais les sections du parti et peuvent négocier leur soutien « au plus offrant » ou « au plus crédible », chaque entrepreneur un tant soit peu connu et reconnu peut espérer tenter sa chance. Les courants apparaissent ainsi aux yeux des militants les plus idéalistes comme des regroupements artificiels et conjoncturels et essentiellement des structures collectives d’allocation de positions de pouvoir. Ils constituent le réceptacle des frustrations militantes et les alimentent en retour. Comme nous le confie François Delapierre, membre du bureau national , « créer un énième courant de gauche, il n’y a rien de plus facile… Les courants localement c’est toujours un moyen de se démarquer pour les militants, donc il y a toujours des gens disponibles pour de nouveaux courants, dans tous les départements et les fédés. Le nouveau courant pourra toujours trouver des correspondants et donc des relais locaux chez des militants déçus ou frustrés… ». La synthèse générale qui a couronné le congrès du Mans a dérouté de nombreux militants rendant rétrospectivement artificielles les luttes qui l’ont précédé pendant plusieurs mois et les entâchant d’inauthenticité. Un militant nous confie : « Qu’ils se rabibochent comme ça en quelques heures devant les caméras, moi j’ai trouvé cela écoeurant, j’ai pas compris ». Emmanuel Maurel, membre du bureau national, écrit à ce propos : « ceux qui regrettent le caractère artificiel du rabibochage final font mine de découvrir cette évidence : essentiellement pragmatique, le PS se soucie de moins en moins des questions doctrinales et des débats théoriques (…) les conseils nationaux qui occupaient il y a peu de temps encore des week-ends entiers sont désormais expédiés en une demie journée » .
Désarroi identitaire et conditions de la fidélité à soi
La « gauche du PS » constitue donc une nébuleuse de courants, de sensibilités, de coteries, fortement instables et généralement liés à une personnalité ou au poids de quelques élus. La fragilité et l’atomisation qui en découlent renforcent le désarroi identitaire, l’isolement et le malaise des militants. L’identité « de gauche » des militants ne peut s’adosser à des structures stables et véritablement socialisatrices. Les rapports de force internes deviennent indéchiffrables. Les reclassements successifs des responsables (comme les parcours sinueux de Laurent Fabius, Julien Dray, Arnaud Montebourg…) suscitent le scepticisme des militants. Certes les courants peuvent, dans une certaine mesure, attacher les militants à l’organisation. L’adhésion à un courant permet de rester dans le parti, sans vraiment y être (à en croire certains militants) en ne perdant pas la face. La légitimité et l’institutionnalisation des courants tiennent à leur capacité à produire des rôles et à en distribuer, à fabriquer des places pour que les militants trouvent la leur. Plus généralement, la capacité à retenir les militants de l’organisation est fonction de la gamme des identités que peut produire et entretenir l’institution et des incitations sélectives qu’elle peut générer. Mais les courants sont trop lâches et instables pour fixer véritablement des identités internes.
Des entretiens réalisés avec des militants de « gauche » émergent insatisfaction, sentiment de renoncement, impression d’un décalage croissant entre leurs valeurs, leurs attentes et l’évolution de du parti. De nombreux militants ne se reconnaissent plus dans « leur » parti et en tirent une réelle souffrance qui relève de ce que l’on peut appeler un « malheur militant » . Ces militants font l’expérience d’un désajustement quasi-permanent. Ils se disent dépositaires d’une tradition, d’une définition antérieure de l’institution qu’ils jugent en voie de liquidation, depuis la dernière élection présidentielle tout particulièrement : « Nous avons été spoliés. Notre parti, notre droit d’être politiquement représentés, tout semble nous avoir été confisqué. Assommés, nous nous sommes retrouvés enchaînés au char d’un vainqueur qui nous a imposé en trois mois ce que nous avions avec sagesse tenu à l’écart jusque là, la troisième voie ‘démocrate’ et l’alliance avec le centre » . La campagne présidentielle a été une période très critique pour ces militants : « faire campagne pour quelqu’un comme Royal que je déteste, analyse un militant du Nord, est quelque chose qui a été horrible, il faut se dédoubler, c’est une expérience assez traumatisante, il faut donner sens à tout cela après mais j’ai du le faire ». La souffrance des militants résulte notamment de la violence symbolique des relations dans le parti et de l’économie morale du cynisme aujourd’hui dominante au PS. Les désaccords tactiques et idéologiques, les rivalités personnelles accumulées, « la tyrannie des petites différences » dégradent le « vivre ensemble socialiste » et sapent la confiance interpersonnelle. François Delapierre analyse : « le PS c’est devenu littéralement invivable, on se supporte plus même entre cadres partageant les mêmes idées, c’est physiquement insupportable, la coexistence et la confrontation dans les instances sont devenus très pénibles, il y a tellement de haines recuites, de divergences accumulées, de rancunes, de méfiance…on peut pas y croire au PS parce que tu te retrouves en permanence avec des gens en qui tu ne peux pas avoir confiance qui t’ont trahi… ».
Les militants ont l’impression de consentir à un sacrifice en restant au PS. L’évaluation des coûts du militantisme intervient quand les composantes négatives de l’expérience militante dominent et que la valeur sociale qui lui est accordé décline. Dans ces conditions, l’exit est un scénario envisagé mais sans cesse différé ou un possible jamais réalisé même si certains militants sont sans illusion . Les militants déploient des formes parfois sophistiquées de rhétorique pour justifier le fait de rester au parti, pour rationaliser le maintien de l’engagement : « on est mieux au dehors qu’au dedans », il faut savoir « renoncer » à soi et à son ego, c’est « plus sale » d’être à l’extérieur, résilier c’est capituler (« ça leur ferait trop plaisir que je m’en aille, je les fais chier, j’ai pas envie des les laisser tranquille »)…Le sens de leur engagement est reconstruit, renégocié, verbalisé dans une casuistique permanente. Il convient donc d’interroger les transactions avec soi et l’institution, les bricolages organisationnels, les « petits arrangements » qui rendent possible le maintien de l’engagement et permettent ne pas perdre la face, de garder un quant à soi, de ne pas s’abîmer dans le collectif partisan.
L’indiscipline constitue une première option : de nombreux militants ont fait l’expérience de la dissidence pendant la campagne référendaire sur le TCE en faisant campagne, de manière plus ou moins directe, pour le Non alors que le Oui l’avait emporté dans le vote interne et donc en enfreignant la discipline du parti. Jean-Luc Mélenchon n’avait jusque là jamais milité de l’extérieur contre l’orientation du parti : « J’ai très fortement ressenti la transgression que cela représentait. Elle m’a coûté, contrairement à ce que des cyniques croient. En effet, je suis un militant et un homme engagé qui croit à l’action collective et aux règles qui la régissent. C’est pourquoi cela n’a pas été facile de m’affranchir de ces règles ». Mais « on ne peut tordre les consciences » . La faiblesse des sanctions qui a suivi ces indisciplines a encouragé certains militants à persévérer. « On a été très étonné de l’absence de réactions de la direction, on y est allé progressivement, on n’a pas été exclu parce qu’on a eu un soutien populaire, notre protection c’est l’extérieur, on a un courant d’opinion pour nous, c’est devenu couteux pour la direction de nous exclure, on est en position de trait d’union avec les autres partenaires de gauche, il est difficile de nous exclure » (François Delapierre). L’incapacité du PS à faire respecter une ligne commune, même légitimée par un vote militant, traduit une élasticité de l’institution qui autorise des militantismes multiples, des semi-dissidences. L’absence de clarification idéologique du PS renforce ce phénomène (si évolution libérale il y a, elle n’est pas véritablement assumée). A quoi bon quitter le parti puisqu’on n’est pas nécessairement engagé par ses choix et décisions ? L’organisation, pour conjurer la menace de l’éclatement, rend possible des usages de la relation partisane multiples et souvent contradictoires qui ont, pour effet, en retour, de miner sa cohésion. Certaines indisciplines sont moins théâtrales, plus personnelles et intimes mais relèvent de transgressions et d’aménagements de soi avec l’institution non moins significatifs, comme celle de ne pas voter socialiste aux élections.
De nombreux militants se construisent une position à la fois en dehors et au-dedans du PS, permettant de cumuler les avantages d’une appartenance au PS mais d’en neutraliser les coûts. Le polyengagement et la multipositionnalité associative ou syndicale permettent de multiplier les identités en jouant sur les frontières de l’organisation. L’adhésion à ATTAC apparaît ainsi comme un refuge : « je crois que si j’avais pas adhéré à Attac j’aurais quitté le PS… Voilà je m’amuse comme cela. Chez Attac j’écoute beaucoup et parfois je défend les socialistes quand même parce qu’il faut pas pousser quand même. Et au PS j’embête mon monde, je raconte mes réunions à Attac, je leur dis qu’ils disent du mal des socialistes et qu’ils ont souvent raison » (militant du Nord). La construction de liens avec des militants d’autres organisations constitue une autre transaction possible qui permet de desserrer l’étau de son parti d’appartenance, d’« aller voir ailleurs ». Depuis le référendum européen, moment de cristallisation décisif de l’identité d’« une gauche de gauche », militants du PS et d’autres organisations se côtoient dans des réseaux où ils partagent des engagements, cette expérience produisant et réactivant le sentiment d’appartenance au monde commun de la gauche. La participation aux collectifs unitaires anti-libéraux a prolongé cette dynamique.
Des clubs et structures diverses se multiplient depuis quelques années à la périphérie des organisations partisanes (Pour la République sociale –PRS-, La Forge, Gauche Avenir…) . Faute de pouvoir peser à l’intérieur de l’organisation ou de courants qui apparaissent dévalués ou « usés », les militants s’impliquent dans des collectifs annexes. Le maintien de l’engagement passe par la création d’espaces ou de lieux en marge de l’espace partisan (contre mais aussi tout contre) permettant d’accumuler des ressources pour peser à l’intérieur de l’organisation, d’éviter les défections des militants les plus déçus et de maintenir des formes de militantisme qui n’ont plus cours dans l’organisation. Pratiquement, ces structures permettent de justifier les entorses à la discipline interne et de jouer avec les règles du jeu de l’organisation.
L’association PRS est exemplaire de ces déplacements aux marges du PS. C’est au sein de PRS que Jean-Luc Mélenchon et ses partisans ont milité pour le Non à la constitution européenne. Définie dans ses statuts comme une association d’éducation populaire « qui regroupe des militants issus de divers horizons de la gauche », PRS est créée en mai 2004 à l’initiative du sénateur. Elle se fixe comme objectif « l’élaboration d’un projet politique capable de refonder une alternative de gauche à la domination matérielle et culturelle du capitalisme de notre époque » et entend contribuer ainsi à « une nouvelle union des gauches ». Ses modes d’action sont « l’élaboration collective, la formation, l’action militante et l’éducation populaire ». Fortement structurée autour d’une revue , des rendez-vous statutaires réguliers et une sociabilité propre, une mailing list active, une division des rôles bien établie, des cycles de formation qui socialisent les nouveaux membres, PRS constitue un groupe fortement intégré (ce qui fait dire à Christian Picquet, responsable de la LCR, qu’elle constitue le dernier « groupe bolchevique en France »). 80% des 2000 adhérents sont membres du PS. Trait d’Union assure l’expression de PRS au sein du PS. Se développe à PRS un style de militantisme intense qui n’a plus cours au PS. « PRS cela permet aux gens de militer, au PS tu désapprends à militer, le PS est un parti réduit à la sélection de candidats, le PS est très pénétré de la mentalité petite-bourgeoise, on est au parti pour se valoriser » (François Delapierre, délégué général de PRS). « Jean-Luc nous encourage à ne pas reproduire à PRS le fonctionnement décadent du PS. Un militant de PRS doit avoir une tâche, doit militer, doit avoir une tâche, être actif, la plupart des militants au PS ne font rien, le PS c’est la déresponsabilisation. A PRS, on essaie de faire un travail sur nous-mêmes, de se défaire des représentations dominantes qui nous polluent. Il y a chez nous des militants qui ont un haut niveau de conscience politique, nous sommes des militants formés. Mélenchon nous dit ‘tractez, travaillez, lisez’ vous êtes porteur d’une culture du texte qu’il faut conserver » (Responsable de PRS dans le Nord). PRS constitue une forme d’exutoire à un engagement douloureux au PS : « PRS nous permet d’être en dehors et au-dedans et d’évacuer la frustration, de ne pas être étouffé par le PS, on veut se distancer du cynisme ambiant du PS, se protéger, se défendre de tout cela, en sortir. On se purifie un peu à PRS » (un militant du Nord). Ce groupe produit en quelque sorte des incitations collectives, des compensations aux sacrifices consentis par les militants (rester au PS). Cette niche militante constitue un entre soi protecteur et intégrateur qui permet de réenchanter le militantisme de ses membres et de satisfaire leur libido militante qui ne peut plus être assouvie au PS. PRS permet à ces militants d’agir. Comme le note Philippe Juhem, « à l’alternative de l’Exit, Voice et Loyalty se posant aux membres mécontents ou marginalisés d’une organisation, il faudrait ajouter une quatrième voie qui serait Action » .
Maintien de l’engagement et illusio militante
Qu’est ce qui en définitive tient et retient ces militants ? Ils sont pris au jeu et dans le jeu et dans la croyance en l’importance du jeu qu’ils jouent. Cette illusio est le résultat de leur socialisation militante qui les attache par divers liens au parti et rend le scénario du désengagement couteux.
Les militants les plus anciens sont tenus par l’expérience passée et par les luttes accumulées qu’un exit donnerait l’impression de liquider. Il est difficile de renoncer sauf à dévaloriser l’investissement auquel on a consenti. Quitter l’organisation ce serait perdre la face : « pourquoi lâcher prise quand on a tellement donné, le parti nous appartient autant qu’à eux, c’est eux qui le bradent, on peut pas capituler… quitter le parti serait donner des gages à la direction qui n’attend que cela. Nous n’avons rien à nous reprocher…C’est le PS qui s’est déplacé, nous nous n’avons pas changé, c’est le champ politique et le PS qui se sont déplacés à droite » (un militant de Reims). « On y a investi du temps dans ce parti, il nous appartient un peu et on se sent plus socialiste que les autres. On a beaucoup de mal à se défaire de l’engagement socialiste, la plupart des gens investis sont des cadres qui ont une longue histoire avec le PS. Il y a un peu une logique d’honneur là-dedans. Partir ce serait un aveu de faiblesse » (Responsable PRS du Nord). Jean-Luc Mélenchon fait valoir l’ancienneté de son engagement au PS pour signifier qu’il n’a pas de comptes à rendre : « j’ai écrit 9 livres en tant que dirigeant socialiste et 20 contributions pour des congrès et conventions socialistes ». C’est un des paradoxes du militantisme dans les partis de gauche : ce sont généralement les militants les plus en rupture avec la ligne officielle du parti qui y sont les plus impliqués et investis. « Le cout de l’activisme en détermine en quelque chose le prix » . L’engagement (sa durée surtout) est un facteur de son propre renforcement.
Les militants sont tenus par ailleurs par les relations nouées dans et par le militantisme. Se désengager serait s’en priver. La fidélité à l’organisation est médiatisée par la loyauté à l’égard des personnes fréquentées en son sein : « S’engager ce n’est pas seulement épouser une cause et y consacrer une partie de son temps c’est aussi endosser un rôle et une identité sociale s’inscrire dans un système d’échanges et d’obligations réciproques, bref prendre des engagements à l’égard des autres » . A cet égard, le témoignage de Jean-Luc Mélenchon est éloquent : « ce n’est pas plus facile pour moi aujourd’hui de poser la question d’une force nouvelle parce que les liens que j’ai avec les hommes et les femmes du parti socialiste ne se réduisent pas aux seuls liens détestables que j’ai avec certain de ses dirigeants. Il faut savoir ce qu’est la vie d’un dirigeant socialiste dans mon cas, qui plus est à la tête d’un courant de gauche. Je fais chaque année deux à trois fois le tour du pays. Je participe à plusieurs dizaines de réunion de militants socialistes dans tous les coins de France. Ma vie est rythmée par les réunions du groupe socialiste du Sénat qui est une oasis de tolérance et de simplicité dans l’univers venimeux des instances nationales du PS. J’ai donc un rapport avec le mouvement socialiste qui est extrêmement profond, humain et mille fois renouvelé. Envisager de se séparer de nombre de ceux qui le composent n’est pas une chose simple. Pour moi, c’est une déchirure que je redoute. Et j’ai la rage de m’être fait voler quelque chose dont je sais qu’il n’est pas légitime de le trouver dans les mains des pirates du courant ‘démocrate’ » . Renoncer au militantisme au PS serait abandonner tout un ensemble de relations sociales.
Les militants élus ou semi-professionnalisés sont aussi tenus, malgré leur dénégation, par les positions de pouvoir occupées ou les anticipations de postes électifs. La dépendance au parti s’inscrit dans des trajectoires de professionnalisation politique. Pour vivre pour la politique (« agir », « peser », « compter »…), il faut en vivre. Elus ou salariés dans des collectivités locales, beaucoup de cadres des sensibilités de gauche du parti dépendent de l’organisation d’autant plus qu’ils n’ont pas toujours d’ancrage local solide qui pourrait sécuriser leur carrière politique. « Beaucoup de cadres élus, des cadres intermédiaires, à la gauche du PS sont conseillers régionaux (élus notamment depuis 2004) et donc très dépendants des luttes partisanes » analyse un membre du bureau national. Les évolutions tactiques futures se manifesteront nécessairement par des reclassements professionnels. « Les élus ne sont pas un problème parce que si on construit quelque chose, on aura des élus, c’est une condition » analyse François Delapierre. La carrière des militants à la gauche du PS, qu’ils soient responsables ou élus, est ainsi une « succession de reconversions indissociablement idéologiques et professionnelles qui s’imposent en fonction des espaces sociaux qu’ils investissent et des opportunités qu’ils rencontrent » .
L’impossibilité de reconvertir ailleurs son militantisme et l’inexistence de possibles latéraux (opportunités de reconversion des ressources acquises, possibilité de renouer avec des réseaux de sociabilité alternatifs…) expliquent enfin le maintien de l’engagement . Lorsque l’on interroge les militants sur les raisons pour lesquelles ils ne quittent pas le PS, la réponse est quasi-immuable : « Quitter pour aller où ? » Le PC, qui apparaît comme un parti en déclin, est faiblement attractif. L’extrême-gauche suscite à la fois attraction et répulsion : de leur socialisation partisane, les « militants de gauche » du PS conservent une certaine éthique de responsabilité et une certaine culture du pouvoir qui les tiennent à distance des groupes d’extrême gauche. Rester au PS se justifie à leurs yeux parce que seul le PS est en mesure de peser sur le cours des choses. « Etre minoritaire ce n’est pas grave mais il faut que ce soit dans le parti qui compte » (un militant de Reims). Il s’agit alors d’attendre le moment opportun ou d’inventer des scénarios de sorties. Les militants s’emploient à faire émerger les conditions du possible en s’adossant aux expériences en cours (d’où l’attention portée aux expériences étrangères de recomposition de la gauche en Amérique latine ou en Allemagne).
Ces militants sont comme les croyants dont les prières restent sans effet mais qui n’en continuent pas moins de croire. Ils sont minoritaires mais tenus par le désir de faire prévaloir leur conception du socialisme. Le bonheur militant et le plaisir de militer font tenir autant les institutions que le malheur ou le désir contrarié qu’elles génèrent. Cette souffrance n’est d’un certain point de vue que l’envers du désir et de l’investissement . Dans leur ensemble, les socialistes sont au moins d’accord pour se disputer le monopole de la définition de ce que doit être l’institution. Pour paraphraser Pierre Bourdieu, ils « sont liés les uns aux autres par ce qui les sépare » .
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1 Michel Offerlé, Les partis politiques, Paris, PUF, 2007.
2 Sur ces phénomènes, on renvoie à Rémi Lefebvre, Frédéric Sawicki, La société des socialistes, Editions du Croquant, 2006.
3 Deux leaders de la Gauche Socialiste, Marie Noëlle Lienemann et Jean-Luc Mélenchon, participent au gouvernement Jospin entre 1997 et 2002.
4 On trouve, notamment autour de Benoît Hamon et du groupe Nouvelle Gauche, beaucoup d’anciens rocardiens au NPS.
5 Julien Dray qui a participé à la création du NPS rejoint François Hollande quelques semaines avant le congrès de Dijon.
6 Jean-Luc Mélenchon, En quête de gauche, Paris, Editions Balland, 2007.
7 Les partisans socialistes du Non ne font pas tous campagne lors de la campagne référendaire nationale. Alain Vidalies et le NPS adoptent une position de retrait au nom de la discipline de parti.
8 « Les conditions lamentables dans lesquelles certains responsables politiques ont fait froidement perdre Laurent Fabius en refusant une motion commune des non et en créant des diversions et des divisions sont un souvenir déprimant pour moi. La duplicité, les compétitions d’ego, tout cela démontre que la gauche du parti est aussi profondément usée. Henri Emmanuelli en porteur d’eau de Hollande, Arnaud Montebourg en arbalétrier de Ségolène Royal : quelle tristesse après tant de mouvements de menton de leur part ! J’en reste là. A quoi bon aller plus avant dans le récit de toutes ces félonies d’arrière cour » (Jean-Luc Mélenchon, En quête de gauche, op cit).
9 Les courants créent notamment des instituts de formation auxquels cotisent les élus. Les élus leurs reversent une partie de leurs indemnités.
10 Philippe Juhem, « La production notabiliaire du militantisme au PS », RFSP, vol 56, 6, 2006.
11 Ibid
12 Entretien, novembre 2007.
13 A l’évidence, cette synthèse a été dictée par des logiques externes et conjoncturelles (parution de sondages très négatifs sur l’image du PS et émeutes urbaines). La limite des luttes internes est bien donnée par la nécessité collective de préserver le capital politique collectif et les chances de succès électoraux.
14 Recherche socialiste, 2006
15 Par opposition au bonheur militant analysé par Jacques Lagroye et Johanna Siméant (« Gouvernement des humains et légitimation des institutions » in Favre (P.), Hayward (J.), Schemeil (Y.), Etre gouverné, Paris, Presses de sciences Po, 2003).
16 Jean-Luc Mélenchon, En quête de gauche, op cit
17 Jean-Luc Mélenchon écrit (Ibid) : « Je n’ai pas l’intention de me bercer d’espérances dont les échéances sont toujours repoussées « on verra après le prochain congrès », « on fera le point après les élections », la petite musique doucereuse du petit bout de pain pour finir le petit bout de fromage et du petit bout de fromage pour finir le petit bout de pain nous a assez anesthésiés. La dernière campagne présidentielle doit servir de leçon : on peut toujours tomber plus bas ».
18 Op cit
19 La situation est proche de celle des années 60 où la SFIO, sclérosée, est débordée par la multiplication de clubs qui apparaissent plus efficaces car déconnectés d’enjeux directs de pouvoir.
20 A Gauche, hebdomadaire, ancienne revue de la Gauche socialiste puis de Nouveau Monde.
21 Philippe Juhem, « Entreprendre en politique de l’extrême gauche au PS : la professionnalisation politique des fondateurs de SOS racisme », RFSP, vol 51, février-avril 2001, page 142
22 Sur cette notion, voir Pierre Bourdieu, « Un acte désintéressé est-il possible ? », in Raisons pratiques, Paris, Le Seuil, 1996.
23 Sur le vieillissement des militants au PS et ses effets, voir La société des socialistes, op.cit.
24 Olivier Fillieule, « Temps biographique, temps social et variabilité des rétributions », in Olivier Fillieule, dir., Le désengagement militant, Paris, Belin, 2005.
25 Bruno Duriez, Frédéric Sawicki, « Réseaux sociaux et adhésion syndicale : le cas de la CFDT », Politix, 63, 2003.
26 Jean-Luc Mélenchon, En quête de gauche, op cit
27 Philippe Juhem, « Entreprendre en politique de l’extrême gauche au PS : la professionnalisation politique des fondateurs de SOS racisme » art cité
28 Dans le processus de désengagement, « la phase de recherche d’alternatives correspond au moment où l’individu, ayant pris conscience de sa liberté de choix, recherche la sortie de rôle et évalue les avantages comparées d’éventuels rôles alternatifs ». Olivier Fillieule, « Temps biographique, temps social et variabilité des rétributions », art cité
29 « On n’est pas forcément disposé à se contenter de ce que l’institution permet, mais plus sûrement porté par sa socialisation à valoriser ce que l’on espérait en retirer » (Lagroye (J.), Siméant (J.), « Gouvernement des humains et légitimation des institutions »art cité).
30 Dans Jacques Maître, L’autobiographie d’un paranoïaque, Paris, Anthropos, 1994 (avant-propos).