Didier Le Reste? secrétaire général de la CGT cheminots, appelle à une grève reconductible à partir de ce soir. Il fustige la volonté du gouvernement de réformer sans négocier.
Propos Recueilli par Muriel Gremillet , dans Libération.fr du 13 Novembre 2007
Qu’attendez-vous de ce mouvement ?
L’ouverture de véritables négociations. Car depuis que le chef de l’Etat et le gouvernement ont annoncé l’engagement de la réforme, peu de choses ont bougé du cadrage gouvernemental. Et les cent heures discussion rue de Grenelle au ministère du Travail dont aime parler Xavier Bertrand ont été uniquement mises à profit pour convaincre les syndicats du bien-fondé de la réforme, de son caractère inéluctable. Et aussi pour les diviser : je note ainsi que la CGT est écartée des discussions depuis quelques semaines.
Pour vous, rien n’a évolué ?
A part quelques évolutions sur l’impact du système de décote, rien n’a bougé. D’ailleurs, je ne suis pas surpris puisque le gouvernement et chef de l’Etat ont dit que rien n’était négociable. Nicolas Sarkozy avait donné quinze jours à son ministre pour arrêter les principes de la réforme. Nous avons vu que la première mobilisation du 18 octobre – qui a été exceptionnelle – a permis de détendre le calendrier. Aujourd’hui, les salariés ne souhaitent pas travailler plus longtemps ni cotiser plus pour toucher, à la fin, des retraites plus faibles. Aujourd’hui, 62 % touchent moins de 1 500 euros brut par mois.
Le gouvernement explique que cette réforme doit être engagée au nom de l’équité entre salariés...
C’est un argument fallacieux. Si l’égalité c’est entraîner tous les régimes vers le bas et dégrader les niveaux de pension versés, personne ne peut l’accepter. En 2003, la réforme a été imposée en dépit de millions de personnes dans la rue, les cheminots se sont inscrits dans la grève alors qu’ils n’étaient pas concernés directement. La solidarité est une valeur forte que nous portons.
Pour vous cette réforme est plus un symbole qu’une nécessité ?
Le candidat Sarkozy avait fait de la suppression des régimes spéciaux une question emblématique. C’est un affichage politique pour démontrer que ce gouvernement et le chef de l’Etat réforment quoi qu’il advienne. Je pense qu’il y a une prise en otage des régimes spéciaux pour régler d’autres questions et peut-être préparer l’opinion à d’autres réformes. Notamment celle de 2008, qui va demander de nouveaux sacrifices aux retraités du régime général. Je regrette cette instrumentalisation à des fins politiciennes. Il y a des possibilités de sortir par le haut de cette situation conflictuelle, mais il faut arrêter les catimini, les réunions bilatérales et travailler enfin dans la transparence en convoquant une table ronde nationale pour engager les pourparlers. La négociation ce n’est pas que la séance photo autour de la table. Mais aujourd’hui, le gouvernement fait le choix du conflit.
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