Paul Quilès a publié sur son blog la note que vous trouverez ci-dessous.
L'autre soir, lors d'un débat télévisé, j'ai entendu une comparaison que j'ai trouvée extrêmement éclairante pour expliquer les réactions du monde développé à l'égard des crises qui secouent le monde et je voudrais la livrer à votre méditation.
Vous avez certainement été nombreux à voir le célèbre film "le Titanic", réalisé par James Cameron en 1997 et qui raconte le naufrage du géant des mers en avril 1912. On y voit, au moment où le Titanic heurte l'iceberg qui va le couler, les passagers les plus riches qui continuent à s'amuser sur le pont supérieur, mangeant, dansant, buvant. Le bateau est tellement bien conçu -il doit résister à toutes les tempêtes!- qu'ils ne ressentent qu'une petite vibration sur leurs verres lorsque le choc se produit.
Par contre, sur les ponts inférieurs, là où se trouvent les passagers les moins fortunés, on comprend vite ce qui se passe et ce qu'il va advenir du bateau et de ses occupants, riches et moins riches. Et là, loin de l'orgueil et de la cécité de ceux qui, confiants dans le progrès, croient à l'invulnérabilité de cette belle construction humaine, c'est la panique, parce qu'on sait que ce superbe bateau, invincible, insubmersible, va couler. La catastrophe n'est pas à venir, elle est là, mais tous ne la voient pas.....
Aujourd'hui, notre monde n'est-il pas confronté à pareille situation? Des crises, génératrices de graves dérèglements et de désordres dangereux se succèdent, s'accumulent et s'ajoutent. Crise financière, crise alimentaire, crise énergétique, crise environnementale, crise sanitaire.....La planète souffre, ou, plus exactement, ceux du Sud et les plus pauvres du Nord, qui mesurent chaque jour ce qui est en train de se passer, contrairement à ceux qui sont (ou qui se croient) à l'abri des crises. Comme pour le naufrage du Titanic, ceux- là ne comprennent pas et pourtant, ils seront eux aussi touchés par les conséquences de cette succession de drames mondiaux: flux migratoires incontrôlés, pollution, dérèglements climatiques, terrorisme, guerres, pandémies.....
Le modèle libéral vacille. Même les plus fervents zélateurs de ses prétendues vertus, aux Etats-Unis notamment, commencent à douter et à se demander s'il ne faudrait pas "plus d'Etat, plus de protection, plus d'intervention de la puissance publique et des instances internationales": autant de gros mots que l'on croyait remisés dans les cartons de l'archaïsme. Imaginez vous qu'on envisage de nationaliser des banques, pour éviter leur faillite! Certains osent même parler de "l'échec du marché"!
Devant cette évolution rapide et surprenante pour certains, la gauche ne peut pas en rester à des analyses mièvres, se contentant de proposer d'améliorer le système, de limiter la casse...faute de mieux, faute surtout d'imaginer une alternative globale. Si elle ne veut pas perdre sa spécificité, c'est à dire l'ambition et la volonté de changer durablement la société et de contribuer à la construction d'"un autre monde", la gauche a le devoir de penser et de parler autrement.
C'est pour aider à cette nécessaire réflexion que le club Gauche Avenir a préparé un document, "Fiers d'être de gauche", qui est le fruit d'un travail collectif. Nous en reparlerons dès sa publication.